Ce poteau-là fut beaucoup plus facile à décoder que la mère Tu m'la... ! Le poteau rose en question, dont mes sœurs et ma mère disaient parfois d’un air entendu que telle ou telle personne avait fini par le découvrir, je l’imaginais surgissant le long d'une de nos petites routes de montagne, seul de sa jolie couleur bonbon dans une cohorte de poteaux ordinaires. Je trouvais l’idée ravissante car les seuls poteaux que je connusse étaient de bois passé au goudron, donc brun noir.

On trouvait le poteau rose planté le plus souvent au cœur d’histoires louches entre adultes : une bonne qui chaparde, un mari toujours absent et son épouse très occupée, un commerçant pratiquant le faux-poids …

Mais parfois, c’était moi qui faisais surgir le poteau rose et gare alors à la furie maternelle, car elle avait découvert une de nos sottises et nous criait aux oreilles, la main levée pour nous talocher : «dis-donc (qu'elle prononçait «didon»), qu’est-ce que tu t’imaginais Didon ? Que j’allais pas finir par trouver le poteau rose ?».

Ce poteau-là ne resta guère debout. Rapidement, j’ai pu obtenir les explications nécessaires sur le pot aux roses qui dès lors s’imprima dans mon esprit avec son orthographe correcte et une connotation si malodorante qu’aujourd’hui encore, lorsqu’on emploie devant moi cette expression ou même en l’écrivant, là maintenant, je crois sentir une odeur de double-vécés mal aérés.