L'Appentis Saucier serait-il en train de devenir politique ou de ne pas devenir ? Nous ne le croyons pas, mais comme on dit, "faut c'qu'y faut". Quand l'actualité nous court aux fesses, il convient de différer la composition de textes plus littéraires, voire poétiques.

Donc : après "LE MARIAGE POUR TOUS" :

LES FEMMES

S'il est un mouvement essentiellement politique, c'est bien le féminisme.

Consciente que Wikipédia n'est peut-être pas la source la plus impartiale qui soit, nous pensons pouvoir tout de même raisonnablement nous appuyer, pour commencer, sur le préalable de la notice consacrée à ce mot : politique.

"Notion polysémique, la politique recouvre au moins trois sens :

- la politique en son sens plus large, celui de civilité ou Politikos, indique le cadre général d'une société organisée et développée ;

- plus précisément, la politique, au sens de Politeia, renvoie à la constitution et concerne donc la structure et le fonctionnement (méthodique, théorique et pratique) d'une communauté, d'une société, d'un groupe social. La politique porte sur les actions, l’équilibre, le développement interne ou externe de cette société, ses rapports internes et ses rapports à d'autres ensembles. La politique est donc principalement ce qui a trait au collectif, à une somme d'individualités et/ou de multiplicités. C'est dans cette optique que les études politiques ou la science politique s'élargissent à tous les domaines d'une société (économie, droit, sociologie, et cetera) ;

- enfin, dans une acception beaucoup plus restreinte, la politique, au sens de Politikè, ou d'art politique se réfère à la pratique du pouvoir, soit donc aux luttes de pouvoir et de représentativité entre des hommes et femmes de pouvoir, et aux différents partis politiques auxquels ils peuvent appartenir, tout comme à la gestion de ce même pouvoir."

C'est pourquoi nous affirmons que la place des femmes dans le monde est une question totalement, complètement et exclusivement politique et non pas une "question de société", avec tout le cortège de sens réducteurs que l'on peut - ou pas - donner à ces mots.

Politique comme dans : lutte.

Il est de notoriété publique maintenant, que l'Appentis Saucier se fait une spécialité du grand coup de bottes ferrées dans les portes de grange béantes ! Mais le sage dit qu'une porte ouverte n'est pas forcément utilisée, même quand sa béance crève les yeux et que parfois, pour diriger la foule vers l'entrée, surtout quand cette entrée est aussi l'une des portes de sortie du Moyen-Age les moins utilisées, il ne faut pas hésiter à mettre en passant un grand coup de latte dans les battants, autrement dit : l'enfoncer en faisant du bruit.

Nous affirmons donc qu'il n'y a pas de petites luttes et de petites causes. La cause des femmes est constamment ramenée à ses dimensions particulières multiples, mais émiettées : du viol au plafond de verre, des agressions verbales quotidiennes aux parités-fantômes de la démocratie occidentale moderne (nous disons bien "occidentale", car la majeure partie des femmes chefs d'Etat, pour ne citer que cet exemple, se trouve en Afrique, en Amérique latine et en Asie) ; des salaires et contrats précaires, à l'obligation de paraître voilée. Du traitement du féminin dans le langage officiel, à la façon dont nous parlons, ou ne parlons pas, des femmes. De leur absence criante ici ou là, à leur présence tout aussi criante dans les sphères de l'éducation, du soin, du service au sens le plus large. Du simple mépris aux violences enfin, faites aux femmes, dont c'est la "Journée" aujourd'hui : violence physique, matérielle, morale, psychologique.

Violence en actes, en paroles et en pensées.

Voici donc à suivre un petit bruit, presque un chuchotement, dans l'échelle de grandeur du bruit qu'il faudrait faire. C'est un courriel d'auditrice envoyé à France Inter avec copie à "Osez le féminisme", ce dimanche 25 novembre. Il n'y est pas question de violence au sens très fort et très urgent du terme, mais plutôt d'oubli, de silence, d'indifférence et de non considération. Ce courriel est une réaction à l'émission "3D le journal" (le dimanche de 11 à 13 heures), un magazine où une demi-douzaine d'invités réagit à l'actualité, sollicités tour à tour par le meneur de jeu, Stéphane Paoli.

"Bonjour à Stéphane Paoli, à son équipe, à ses invités,

Bien que n'ayant reçu aucune réponse à un précédent courriel (aucune réponse à aucun courriel d'ailleurs), je me permets de persister avec la même remarque.

J'avais interrogé voici quelque temps Stéphane Paoli sur le choix de ses invités. 3D est une des émissions intéressantes de la grille dominicale car elle va au fond et prend le temps nécessaire de l'analyse.

Mais, et c'est un gros "MAIS", les invités sont dans une très grande majorité - une majorité qui confine au scandale - masculins. Le plus souvent pour tout dire, on est dans le 100 % hommes.

J'en avais fait le décompte en recherchant les archives sur deux années : navrant. On doit errer entre les 10 et les 30 % de femmes tout compris ; et encore, en faisant une moyenne, c'est-à-dire en lissant beaucoup les chiffres.

Dans la palette des invités d'aujourd'hui, non seulement la non-parité totale est une fois de plus la règle (et ne me dites pas que 3/5 des personnes "aux manettes" sont des femmes, cela ne fait que rendre plus choquant le parti pris du choix des invités), mais encore, l'un de ces invités, en parlant de Marseille, dit (je ne garantis pas au terme près) : "c'est un peu comme un homme qui a une femme bossue, qui l'aime mais n'ose pas la montrer à ses copains".

Sans commentaire.

Ou plutôt si : le seul exemple qu'a trouvé ce monsieur, qui par ailleurs venait de dénoncer les clichés à propos de Marseille, c'est un exemple à la fois sexiste (c'est la femme qui est bossue) et machiste (les copains à qui l'on ne peut assumer de "montrer" "sa" femme).

A cet invité qui pense qu'on "montre" sa femme aux copains ; qu'on peut avoir honte d'une femme non conforme à l'idée de femme que véhiculent les hommes ; à Stéphane Paoli, qui visiblement ne s'intéresse pas aux constats des auditrices (je ne dois pas être la seule à pointer le parti pris de son émission), j'exprime mes regrets de devoir maintenant quitter l'audition de ce programme, je le redis : très bon, mais qui gagnerait en excellence s'il introduisait une vraie parité, en permettant à la pensée, à la réflexion, à l'expression féminines, d'enrichir notablement un débat qui trop souvent tourne à la "discussion entre hommes", et pis encore : sans que personne ne voie où est le problème.

Je suis sûre que votre invité n'a pas la moindre idée de ce qu'il a dit, ne s'est pas entendu le dire, voire trouverait ma remarque au mieux injustifiée et me prouverait par a+b qu'il est tout à fait féministe, comme on justifie le fait d'émettre des propos racistes par l'affirmation selon laquelle on est ami avec au moins une personne d'un autre continent.

Je suis désespérée par cette stagnation culturelle qui fait qu'à 64 ans je ne vois aucune évolution, depuis presque 50 ans que j'ai conscience d'être une fille puis une femme, dans la façon dont les hommes parlent de nous, si j'excepte quelques lieux évolués, malheureusement anecdotiques.

Aucune évolution non plus sur la place des femmes dans les débats de société.

Je dois dire qu'à France Inter, Stéphane Paoli est presque une exception, car il est l'un des rares - sinon le seul - à pratiquer cet ostracisme, volontaire ou non. Une rapide analyse de la grille le montre sans conteste.

Comme j'ai le sentiment de devoir justifier mon intervention, j'ajoute qu'en continuant - consciemment ou non - à confisquer le discours et donc l'opinion, les hommes, qui détiennent les clés du plus grand nombre de lieux où s'élabore la culture de demain au sens large : lieux politiques, financiers, économiques ; lieux de savoir, lieux de l'information, lieux culturels ... Les hommes donc, se privent d'une très grande richesse et d'une possibilité de faire avancer leur propre destin. Tant pis pour eux.

Cette lettre, qui peut-être n'éveillera pas davantage d'écho, sera également envoyée au mouvement "Osez le féminisme".

Bonne journée les hommes,

Marie-Hélène Vernay"