"Xylipolexe toi-même", une espèce d'espèce "d'À supposer", fut écrit en hommage et en remerciements à un très beau, dans l'absolu (et très beau dans sa sobriété) recueil de voeux en quatrains adressé par Robert Rapilly à ses amis en janvier 2010. L'AS eut l'honneur et le bonheur d'y trouver son nom calembourdé de jolie manière et associé à plein d'autres, mais des grands. Elle en rosit ! Puis décida de remercier ; ça lui prit du temps, mais elle finit par lui envoyer, à RR, le texte publié dans le billet n° 30.

Pour en savoir plus sur le Xylipolexe de Robert Rapilly : http://nouvellerevuemoderne.free.fr/bulletinNRM21.htm.

Dans la postface de ses "Voeux 2010, Quatrains & Calembours dédicacés" (Editions du Camembert), R. Rapilly, qui se révèle chercheur en calembourrique, énonce :

- Un chantier : "Sur la table de dissection, une mécanique hybride de parapluie et de machine à coudre s'appliquera au vivant"
- Un credo : "D'emblée le calembour convoque, pas moins, l'énigme d'une poétique en abyme"
- Un théorème : "La force du dispositif tient au dosage de deux principes élémentaires : capillotraction et xénogreffe"

Mélangez, secouez : vous obtenez, après une exergue réjouissante qui donne le ton : "Good year ? Un pneu, mon n'voeu !" , un projet que RR explicite dans son introduction :

"Mes bons voeux d'an neuf et dix, en forme de quatrains, posent des devinettes ; la solution qui s'ensuit est un calembour sur le nom des dédicataires, camarades ou auteurs dont oeuvre ou citation apparaît en caractères gras.

Manuscrit adressé sans moquerie, on trouvera là non des portraits, rien que bienveillantes farces imitées des variations de l'Oulipo sur "Montserrat Caballé" ; à supposer que ça fasse sourire, j'aurai comblé mon ambitieuse ambition.

'Xénogreffe' & 'Capillotraction' sont les maîtres mots de la calembourrique, théorie de la nature et du destin du calembour frôlée en annexe ; et "disparate" le mot de la fin, en dépit de vagues regroupements thématiques des strophes".

Le livret s'illustre de reproduction de ses tableaux, parmi lesquelles on reconnaîtra le vase bleu qui orne son Blogue (http://robert.rapilly.free.fr/), vase ici rebaptisé "Pot terne", ou encore le "Loup ange" qu'il a fait asseoir avec son Chaperon Rouge en haut à droite de la page de l'Appentis Saucier.

Evidemment, rien de ce qui précède - hormis les citations - ne rend vraiment justice à cette réussite poétique esthétique et rigolarde, que l'AS feuillette présentement pour en extraire quelques entr'aperçus. Mais là, franchement, posséder ce petit truc de format 10 x 15 d'une grosse quinzaine de pages, c'est un privilège que, un bisanniversaire plus tard, elle goûte encore.

Un seul regret, une tristesse : Gueule d'Amour, matou distingué et affectueux qui goûtait la poésie (mais seulement après ses croquettes), n'est plus là pour en écouter patiemment la lecture en clignant ses yeux d'or.

Quelques citations maintenant :

Pour l'AS :

''Dans la venelle vint le vent,
j'entends encore les barrières
grincer au passage émouvant
par tous temps entre deux frontières

Ma ruelle n'hivernait''

La dédicace à Alexandre Dumas (quand on vous dit qu'on voisine avec du beau linge, c'est pas de l'intox) :

''Que reste-t-il vingt ans après
du quotidien de la Courneuve ?
De la scorie et des regrets
consumés d'espérance veuve

Ah ! les cendres d'Huma...''

A Claude Lévi-Strauss :

''Qui prend et pose son panard
à l'étrier d'azurs épiques
transmute en Pégase un tocard.
(supplique des tristes tropiques)

Que l'ode lévite rosse''

Enfin, à tout seigneur tout honneur :

"Navet, linge, oeil-de-vieux par l'heur
d'être cadrés font contingence.
Quelque légume rave ou fleur
existe dès lors qu'on s'y penche.

Chaque chou est."

... On aura reconnu Jacques Jouet

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Jacques Jouet, justement ...

A propos de la forme "À supposer", dont il est l'inventeur, nous trouvons cette définition sur le site de l'OuLiPo, à la rubrique "Contraintes" :

"Un À supposer est un texte en prose (mais peut être un poème en prose) composé d'une phrase unique très développée, initiée par la formule : 'À supposer qu'on me demande ici de ...'

Pas de ponctuation forte au milieu de la phrase, qui laisserait entendre qu'il y a plusieurs phrases.

Un À supposer sérieux compte au moins 1000 signes (200 mots).

L'origine est moins proustienne que mallarméenne : maints sonnets de Mallarmé sont clairement des défis à n'y faire qu'une seule phrase. J'ai beaucoup utilisé cette contrainte (et devenue cette forme) pour des situations de commande où, précisément, on me demandait de réfléchir à tel ou tel sujet."

Fiche rédigée par Jacques Jouet
http://www.oulipo.net/contraintes/docs/a-suppposer