Fenêtre 1
Soleil de givre dans le coton des brumes
arbres de lumière
vert glacis des prairies
les vaches ont si froid au bord des étangs de mercure
(leur masse viandue serrée dans leur peau blanche)
qu’elles ont l’air d’être en pâte d’amande
Les rails luisants m’emportent dans l’hiver

Fenêtre 2
Soudain l’effiloche des nuées ouvre le bleu
le soleil donne le ton
les prés se hérissent d’herbe vraie
sur la plaine radieuse une illusion de chaleur
répand son jeune ciel.
Mais la chaleur pour l’instant
vient de l’intérieur du wagon
décembre n’est pas tout à fait l’été

Fenêtre 3
L’abricot du couchant précoce étend sa lueur sur la noire canopée des forêts automnales

Fenêtre 4
Là où la Bourgogne le cède à l’Ile-de-France
là où la capitale
aussi loin qu’elle peut planter ses dents grises
attrape les lambeaux restants des plaines à blé percées et repercées de routes.

Fenêtre 5
Le temps de l’écrire
l’abricot a sombré dans l’orange anthracite
à sa rencontre un avion blanc
la Gare de Lyon arrive à 200 à l’heure
avec ses enchevêtrements de graffitis
Ville tu m’enserres