Avez-vous lu les billets n° 40 et 41 ci-dessous ?

Sinon ==> Résumé des épisodes précédents

''Sultan s'ennuie - Achète cheval - Ne s'ennuie plus - Sultan amoureux cheval - Désire cheval apprenne langage humain - Premier serviteur s'attelle à la tâche - Recrute trois religieux - Mission : hommes de foi, au moyen pouvoirs divins, faire parler cheval.


Aussitôt que devant le sultan et son éminence grisâtre, le premier religieux entre dans une violente colère. Les enseignements divins, affirme-t-il, ne peuvent servir à faire parler un cheval. Sultan ou simple croyant, du plus puissant au plus humble, tous se doivent de respecter la volonté de Dieu. Fi, donner la parole à un animal !! En tout cas, lui il s’y refuse avec la dernière vig

- Whizzzzzzzz Schprouikk, pof !

Le cimeterre a parlé net et bientôt, la tête courroucée du religieux roule aux pieds du sultan hors de lui. Cet homme a manqué de respect à son cheval, il méritait la mort. «Qu’on l’emporte hors du palais», hurle le sultan, «lui et ses deux morceaux, afin que tous voient à quoi l’on s’expose en insultant le cheval du prince. Ma vie ! Mon cœur et mon foie ! Un animal ! Aaaarrgh !! Scrgngn, hooommphh, j’écume !!!».

Si les deux autres, morts de peur, n’avaient pas assisté à la scène, peut-être se fussent-ils eux aussi drapés dans une dignité qui, ils le voyaient bien maintenant, se fût révélée plutôt néfaste pour leur survie.

Le sultan, un peu gêné, essuya son cimeterre au bas de sa robe de soie, le remit à l’étui et s’enquit auprès du prêtre :

- Et toi ? Je te reconnais. Tu diriges le monastère sur la colline voisine. Un saint homme à ce qu’on m’a dit. Penses-tu pouvoir enseigner la parole à mon cheval ? Ton Dieu t’y aidera-t-il ?

- Maimaimais, Vénérable Prinprince, bien sûr que je vas essayer ! (le directeur de convent claquait des chaillottes). Je vas même essayer tout de suite, il me faut juste une nuinuit avec l’animamal, je ferai tout ce qui est en mon poupouvoir.

- Souhaite que ton poupouvoir soit efficace, gronda le sultan. Ma patience a des limites. (Pourvu qu’il n’aille pas le faire bégayer, songea-t-il agacé).

Le prêtre se fait amener le cheval et s’enferme avec lui dans ses appartements pour la nuit, en proie aux plus mortelles terreurs. Il en sue toute son eau, pleure, se conchie, supplie le cheval de causer un peu pour lui garantir la vie sauve. Il prie Dieu et tous les saints comme on n’a jamais prié, il entre même un peu en transe … Le cheval hoche la tête gentiment, puis, comme tous les chevaux, il s’endort debout, indifférent à l’angoisse du condamné.

Aux premières lueurs de l’aube le sultan est à la porte. Après avoir constaté que l'akhal tekin ne répond toujours pas lorsqu’on lui adresse la parole, même avec humilité, grande amitié et douceur, il fait sortir celui-ci.

Pour ménager l’amour de sa vie, le sultan s’assure qu’on éloigne le cheval et, malgré les cris et les supplications du religieux, whizzzzzzz schprouikk pof, derechef.

Retiré dans ses appartements, le troisième homme de foi entendit le tumulte et en déduisit que le supérieur de monastère, à son tour, avait failli dans sa mission. Cela ne l’étonna point, car pour lui, il avait compris que nulle intercession divine, dans quelque religion que ce soit, ne pourrait réaliser ce type de miracle.


Le cheval va-t-il enfin parler joual ? Pour le savoir, rendez-vous lundi au billet n° 43. Demain dimanche : interlude !