"Si cette question, cette dynamique, ne prend pas le pas sur le reste, on est alors toujours piégé dans une histoire de krach boursier, de simple purge salutaire entre capitalistes. Au-delà de la prophétie de la crise finale, que l'on trouve dans les vieux bréviaires ou dans la littérature chic et radicale, où trouve-t-on une mise en cause de la reproduction sociale, où dépasse-t-on le stade du mécontentement et de la défense formelle des rapports sociaux existants ? Quelles sont les activités du prolétariat, qui dépassent le cadre de la politique ou de la revendication ? En quoi le contexte et le contenu de la crise actuelle influencent-ils le contenu même de ces activités ?

Le capitalisme est en mutation, il l'est même de façon permanente et inhérente. Se joue aujourd'hui pour lui la forme, le modèle qu'il doit prendre pour sa propre survie, sa propre reproduction. Dans la douleur, la dépression et les larmes s'il le faut."


***

Ces lignes fortes, sévères et empreintes d'une sinistre vérité, se trouvent dans un petit ouvrage qui occupe la table de la Taulière ces jours-ci, et qu'elle lit avec la même voracité qu'un polar de Westlake (mais qui la fait moins rire). Il s'agit de "Soudain, un inconnu vous offre un conteneur - transport maritime & production mondiale", une brochure sacrément bien gaulée de 80 pages rédigée anonymement, éditée chez http://reposito.internetdown.org/cahiers/, une adresse hyper cryptée, dans le mode habituel de la littérature anar (1).

Cela dit, quand la Taulière affirme qu'elle le lit comme un polar, il y a des raisons à cet engouement :

1 - c'est extrêmement bien écrit, dans un style enlevé et captivant, même lorsqu'on parle de tonnages ou qu'on aligne les termes techniques, bien dosés pour ne pas noyer la lecture. Chaque chapitre est comme le dévoilement d'un aspect de la chose maritime actuelle. La lectrice découvre, page après page, une articulation bien huilée qui met en rapport l'évolution du transport maritime dans tous ses aspects : métiers de la mer, métiers des quais et de "l'hinterland" (= arrière-pays, c'est-à-dire la zone d'influence d'un grand port sur le morceau de continent que, derrière lui, il alimente) et l'exploitation de ceux qu'on appelle les prolos (dénomination, je le fais remarquer au passage et sans aucune amertume, fortement connotée masculine. Or, je serais curieuse de connaître le nombre des "prolettes" dans le monde), celleux qui alimentent les conteneurs en participant à la fabrication de la marchandise planétaire.

En effet, ça va sans dire mais ça va mieux en le disant, il y a lien immédiat entre la chose transportée et la chose fabriquée, acheminée, vendue, consommée : le tour de l'activité capitaliste est bouclé. Ce qu'on en observe, au travers de cette brochure archi-documentée et construite avec rigueur, à la fois fait trembler et suscite cette réaction, du type "c'est pas possible, qu'est-ce que je vais encore découvrir au chapitre suivant", qui fait qu'on ne lâche pas un livre.

2 - ou plutôt 1&1 : la Taulière a fait ses débuts professionnels dans une agence d'affrètement fluvial et route, en 1971 pour tout vous dire. Elle a donc vu fonctionner un modeste port fluvial (Rambaud, port de Saône à Lyon) d'où partaient essentiellement des cargaisons de céréales (maïs et blé) montant en Allemagne, plus quelques chargements de bauxite et d'un truc absolument dégueulasse : le ferro-silicium, dont les aspects les plus ludiques sont qu'il s'enflamme au contact de l'eau (d'où le caractère joueur du marinier qui en embarquait 250 tonnes pour un voyage de 3 semaines à destination de la Ruhr) et qu'il dégage des vapeurs toxiques devenant létales au bout d'un nombre de jours assez précis, délai que ne devait évidemment pas excéder le voyage.

A cette époque déjà empreinte d'un grand humanisme écologique, le seul viatique qu'emportât le marinier à bord était un dispositif de tubes contenant un révélateur des vapeurs toxiques en question, charge à lui de vérifier leur taux en descendant briser un tube dans la cale. Et, si celui-ci prenait la couleur fatidique annonçant la saturation en vapeurs, quoi faire : courir à quai ? Téléphoner à Brest (2) ?

Cette forte contrainte amena un jour Cap'tain Herbert (nous ne donnons que le prénom) du bateau Passat immatriculé à Duisburg, à brandir son flingue pour exiger le passage prioritaire et rapido d'une écluse. Herbert n'était pas un gaillard facile. Il menaça un autre jour de passer ma patronne par la fenêtre s'il n'obtenait pas ses documents de navigation dans la minute. Il avait déjà fait basculer la baie vitrée et notre boss, au bord de l'évanouissement, s'était acharnée sur son téléphone pour lui donner satisfaction, bien qu'après, Herbert avait assuré qu'il n'avait "jamais eu l'indenzion de basser à l'agte, Gère Madame".

Minuscule anecdote ! Celles collectées au cours des deux années que la Taulière passa dans cet univers dingue fourniraient un récit assez dodu. Voilà pourquoi le transport par eau l'a fascinée (un côté Far-West, fière corporation, couilles sur la table et en même temps non dépourvu d'une élégance désuète). A vrai dire, les questions de transport l'ont toujours passionnée et, malgré une palanquée d'autres métiers abordés au cours de sa carrière, cette expérience-ci demeure inoubliable et précieuse au titre de la compréhension du monde. Elle est la scène primitive qui l'a fait entrer dans le marigot des affaires et s'immerger dans la vie et les moeurs des grands prédateurs.

Et donc :

3 - Pour revenir à cet opus qui cause de conteneurs, le pote qui l'a glissé à la Taulière l'a fait après que celle-ci lui avait parlé avec enthousiasme de "Terminal Frigo", de Jean Rolin (cf billet 222 du 17 mars). Dans son bouquin, Rolin chroniquait entre autres une grève restée célèbre sur les quais de Dunkerque - ou du Havre - dans les années 80 (ou 90 ?) et qui aboutit à l'implosion du syndicat des dockers, CGT historique d'un côté, et syndicat connoté genre social-traître de l'autre, avec une guerre fratricide entre les deux leaders.

Dans la brochure des conteneurs, il est d'ailleurs fait mention de ces événements, dans le contexte plus large des luttes syndicales et ouvrières sur les quais des grands ports. Le Havre ou St-Nazaire ? Faudrait que je vérifie.

Or, il n'est rien que la Taulière prise davantage que des lectures contextualisées, l'une menant à l'autre ou en procédant, comme si l'on découvrait le même paysage depuis deux montagnes différentes.

Si Rolin adopte - forcément - une grille de lecture littéraire (et journalistique), voire poétique, les auteur-e-s de "Soudain, un inconnu..." ont affaire, elleux, aux faits. Et les faits ne sont pas jolis-jolis. Rolin les décrit bien, pourtant. Mais en entrecoupant son récit de longs arpentages pédestres et oniriques autour des darses, en s'attardant au zinc des Seamen's Clubs où de temps en temps le marin saoul explose en gerbe, en rendant compte de ses rencontres, il a voulu - et superbement réussi - un parti-pris romanesque.

A propos de roman, la première page de "Soudain, un inconnu..." s'ouvre sur un extrait de "Le Vaisseau des morts" (1926), du mystérieux B. Traven. Cet hommage à un auteur anarchiste donne le ton, mais son texte, lui, vous amènera sans barguigner au constat désabusé que rien n'a changé, dans la "marmar" (marine marchande), depuis que le Tuscaloosa "(First rate steamer, made in USA)" promenait le narrateur de la Nouvelle-Orléans à Anvers au début du 20e siècle avec une cargaison de coton.

Après avoir raconté son boulot sur le bateau (peindre et repeindre pour un salaire issu d'un lance-boulettes), le narrateur conclut "Voilà qui vaut bien cinquante années de travail et d'économie ! On s'est assuré le ciel, et la terre, c'est pour les autres".

C'est a priori (je n'ai pas tout à fait terminé la lecture) la seule référence littéraire explicite (3), après quoi l'on rentre dans le dur, direct, avec "Vogue la galère", premier chapitre consacré au travail maritime et aux enjeux de la conteneurisation. "Sur les docks" fait le tour de l'activité portuaire et des conflits sociaux (voir plus haut) qui en émaillent l'histoire à partir du statut très particulier des dockers. Description des grands ports, analyse des mouvements de salariés, focus sur les ports d'Afrique et du Maghreb... Ce chapitre nourri vous en apprend toujours plus.

"La crise sur le bateau" raconte 2008, la chute brutale du trafic de conteneurs (et, en amont, de la production low-cost qui en constitue les cargaisons en provenance d'Asie pour l'essentiel), les conséquences humaines et environnementales dont on n'a pas encore mesuré tous les effets mortifères : licenciements massifs ; débarras des salariés comme de la denrée périmée, armements philippins et autres, bateaux abandonnés avec leurs marins à bord ; désossage des carcasses amiantées dans les ports indiens... La presse s'est fait l'écho, tout au long de cette décennie, des innombrables scandales liés à cette activité sans morale où les mots "fortune de mer" prennent tout leur sens d'exception juridique, de cupidité et de rapine. Mais ici, le tout est relié, l'analyse met en perspective les événements pour en montrer la causalité, pas toujours visible par le lecteur moyen. C'est par le sombre paragraphe cité en tête de ce billet, que se termine ce chapitre.

Il reste à lire "Transport, production, conflits de classes", qui s'intéresse devenir du transport maritime (et autre) et aux implications évidentes sur les prolos qui fabriquent, transportent, manutentionnent... et l'annexe "Abordages", consacrée à la piraterie. Gageons que l'éclairage de ce chapitre final sera différent des comptes rendus anxiogènes qu'on entend à propos, par exemple, des fameux "pirates somaliens" (4).

En annexe figure aussi une impressionnante bibliographie et un recensement des très nombreuses images, malheureusement entaché, lui, de nombreuses erreurs. C'est un des quelques points faibles (l'autre étant l'inégalité des textes, de rares pages étant assez mal écrites ; un risque à prendre lorsqu'il s'agit d'un travail collectif et qui n'enlève absolument rien à l'ensemble) de cette magnifique brochure, magnifiquement illustrée dans toutes les valeurs du noir au blanc : carte très éclairante du trafic maritime mondial ; reproductions de toiles, photos mélancoliques de ports, de porte-conteneurs échoués, de quais noyés dans les brumes, de vagues sombres, de sites déserts ; superbes gravures de Franck Masereel (Anvers, 20e siècle)...

Cette publication n'est pas qu'une description. Elle dénonce, de manière très intelligente : ce n'est pas un libelle simplement polémique, mais un puissant état des lieux dénué de complaisance. Les auteur-e-s ne cherchent pas à nous convaincre ; hélas, ellils ont en mains tous les éléments pour que nous fassions notre conviction nous-mêmes.

On en sort en tout cas convaincu d'une chose au moins - ça va sans dire, mais ça va mieux en le disant : chaque fois qu'un chef d'état, un premier ministre (au hasard), un patron ou encore un économiste appointé emploient le mot "croissance" (reprise de la croissance, points de croissance, maintenir une croissance etc.) il faut se souvenir qu'ils parlent couramment la novlangue. De la même façon que le Ministère de la Vérité, dans 1984, est celui qui falsifie l'Histoire, "croissance", aujourd'hui, signifie : profit. Quant à "profit", il ne signifie que "profit pour l'actionnariat".

Une autre histoire, toujours la même

Pendant que la Taulière bossait chez les affréteurs, il y avait déjà eu quelques crises structurelles dans le transport fluvial, et des conflits comme celui qui avait abouti, en 1973, au barrage de la Saône par les péniches accotées les unes aux autres, sous l'égide du très poujadiste "CID-UNATI", lequel était venu nous séquestrer dans l'agence pour des motifs qui m'échappent aujourd'hui.

Le patron et son commercial, cherchant à cette époque quelques débouchés (c'est le cas de le dire) diversifiés, s'intéressèrent brièvement au maritime mais revinrent bredouilles de leur voyage exploratoire à Marseille. Le seul affrètement qu'ils auraient pu réaliser (un bout-en-bout Méditerranée/Nord via Port-St-Louis et les canaux de France), fut enlevé, pour la partie maritime, par "Chargeurs Réunis".

Les boss étaient rentrés en prononçant le nom de ce géant du transport avec une certaine révérence, comme s'il s'agissait d'un parrain de la mafia auquel on ne rêve même pas de dépoussiérer le revers du veston : "Chargeurs, c'est Schlum".

Décodons : la famille Schlumberger fait partie de l'histoire capitaliste des 19e et 20e siècle. En gros, les deux frères Schlumberger, "fils" du textile alsacien (une forteresse industrielle très ancienne), ont investi dans tout ce que l'époque présentait de très payant et leur nom est associé aujourd'hui à ce qui se fait de mieux dans l'industrie pétrolière.

Il serait injuste de ne présenter ces gens, qui appartenaient évidemment de plein droit au club très puissant des "deux cent familles" de l'entre-deux guerres, que comme faiseurs de fric. Ils ont été aussi des inventeurs, des philantropes, surtout du côté des épouses, fallait bien qu'elles s'occupent mais rendons-leur cette justice qu'elles auraient pu se contenter de tester les petits-fours de chez Rebattet. On est dans la tradition des grands financiers protestants, et ils étaient aussi (surtout les femmes) des intellectuels, voire des artistes.

Pendant ces deux siècles-là, d'autres frères, d'autres banquiers (Vignal) fondaient au Havre la Compagnie des Chargeurs réunis, qui va transporter de la banane et du voyageur pendant un siècle au moins.

Quel est le rapport ? Eh bien, il se trouve que les Schlumberger comptent dans leur descendance par alliance les frères Seydoux. Famille de capitaines d'industrie aux nombreux héritiers - dont l'actrice Léa Seydoux - et dont un des frangins, Jérôme, s'est offert en 1980 les Chargeurs réunis devenus ensuite "Chargeurs".

Bon, se disent les lecteurs qui ne se sont pas encore endormis depuis qu'on a pris la mer, mais qu'est-ce qu'elle nous bassine, là ?

Attendez.

Je ne sais pas par quel miracle mon boss de 1973 pouvait connaître un lien entre Schlum et Chargeurs, mais le fait est là. Une histoire d'actionnariat sans doute, ou alors je l'ai rêvé, ou alors ils en parlaient déjà...

Et puis, et puis... dans les années 85/90, si vous alliez au cinoche, vous ne pouviez manquer de voir sur l'écran, comme aujourd'hui on voit "Le Pacte" ou "BAC films", ce nom qui faisait vibrer ma fibre transporteuse : "Chargeurs". Et moi, encore si naïve malgré mes quatre décennies et une carrière assez plurielle dans le marigot en question, je me demandais bien ce que foutait Chargeurs ici. Comme quoi on peut toujours s'améliorer. Décidément, je n'arrivais pas à concevoir qu'il y eût un lien entre les Chargeurs des bateaux et le cinéma, j'ai même pensé à un homonyme !

Or, si (comme le restau du même nom). Un lien tout à fait logique, même si ça ressemble à un inventaire à la Prévert.

Seydoux, via "Chargeurs", procède entre 1983 et 2000, à une diversification forcenée tous azimuts et passe, s'étant payé au passage UTA avant de le céder à Air France, du transport maritime à l'aérien, de celui-ci à l'hôtellerie, puis au textile (retour aux ancêtres alsaciens ?), etc. Il ne va donc pas rater un secteur extrêmement beaucoup plus juteux que tous les autres : la communication et les réseaux.

Je vous la fais courte : s'ensuivront Pathé, Gaumont, la production cinématographique, etc. etc. Concentration horizontale massive, boulimique.

Et après toutes ces transformations quasi karmiques, qu'est-ce donc que Chargeurs aujourd'hui ?

"Chargeurs, groupe industriel et de services d’implantation mondiale, exerce en leader sur les niches de la protection temporaire de surfaces, des textiles techniques et de la laine peignée. Chargeurs emploie 1 600 collaborateurs dans 31 pays, sur les cinq continents, au service d’une base de clientèle de plus de 45 pays. Le chiffre d’affaires consolidé 2013 s’élève à 466,5 millions d’euros dont 93 % réalisés hors de France."

Ces chiffres, balancés sur la notice Wiki à partir de la présentation de Chargeurs sur son propre site (on reconnaît le corpus lexical guerrier et cynique des grands groupes), peuvent se commenter à la louche :

- Chacun des 1600 salariés de Chargeurs a donc généré (pour l'année 2014) un chiffre d'affaires d'environ 300 000 euros. Ramené aux coûts salariaux des "31 pays", si l'on songe à la ténuité de la masse salariale telle qu'on peut la supposer dans lesdits 31 pays, c'est pas mal comme retour sur investissement.

- 93 % du CA est réalisé hors de France, par une boîte fondée en France par de très anciens industriels français qui se sont enrichis en faisant suer le burnous à des générations d'esclaves sous-payés, sur le territoire français, métropolitain et colonies. Même une grille de lecture patriotarde donnerait le tournis !

- Jérôme Seydoux n'apparaît plus aujourd'hui que pour 6,5 % du capital de sa "boîte" (on devrait dire : de son conteneur), et l'actionnariat "non-résident" (qu'en termes élégants ces choses-là...) représente tout de même 20 %.

Qu'est-ce qu'on voit donc là ? Des gens qui sont extrêmement réactifs, qui ont su voleter comme des charognards d'un butin à un autre, exprimant tout le jus d'une activité avant d'en absorber une autre. Aujourd'hui, ceux qui méritaient leur nom de "Chargeurs" avec leur flotte havraise, vendent, toujours sous ce même nom maintenant vide de sens - pardon : exercent en leader sur les niches - de la protection temporaire de surface, de la laine peignée, etc. Et pourquoi pas de la farine d'épeautre ?

Cette histoire, qui pourrait se lire comme une épopée moderne de l'industrie ingénieuse, inventive, capable d'adaptations transcendantes, recèle en fait, comme toujours, son récit sub-liminal : celui, qui ne figure nulle part, du nombre des cadavres sur le bas-côté : celles et ceux qui ont engraissé la famille en question dans les différents domaines où elle est allée butiner, et qu'elle a ensuite abandonnés comme des coquilles vides, accélérant toujours plus ses reconversions, dans une marche en avant dont le seul objectif est l'augmentation des dividendes redistribués aux actionnaires (résidents ou non...).

On rapprochera l'épopée Seydoux de l'exemple, relevé dans la brochure "Soudain, un inconnu vous offre un conteneur", de STX-France, filiale de STX Shipbuilding, entreprise sud-coréenne qui emploie sur le territoire français 2100 salariés en 2012, et "fait bosser pas moins de 4000 salariés de sous-traitants dont 1000 de nationalités étrangères."

Dans l'aquarium planétaire où croisent inlassablement ces gros prédateurs, lequel est le plus immoral ?

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(1) Pour être complète, voici ce qu'on trouve sur la couv en guise d'indications éditoriales : "premier cahier, automne 2012" - suit un isbn, puis "descahiers@gmail.com" et l'adresse de reposito.internetdown (et en effet, quand on va sur la page, internet est down !).
La Taulière, qui est alimentée de ce genre d'ouvrages par un potos stéphanois, n'aurait pas su autrement que ce livre existait, et encore moins comment se le procurer, le site cité lui étant parfaitement hermétique.
La parano aiguë des milieux anar est carrément pénible pour la/le lambda, et en même temps, on veut bien entendre que les gens qui gravitent là-dedans n'ont pas envie d'être emmerdés.
Si ça doit aboutir à des publications de ce calibre, alors ils peuvent rester parano, ça n'empêchera pas de tirer un grand coup de chapeau aux rédactrices-teurs de cette histoire de conteneurs pour la qualité de leur boulot. Bien des universitaires pourraient s'en inspirer : clarté, intérêt, rigueur des sources, rédaction digeste.

Big up, les gen-te-s !

(2) "Téléphone à Brest", réponse donnée autrefois par le gradé au marin de base qui, dans le contexte d'une situation critique (gros grain, panne de chaudière, voie d'eau, etc.) aurait eu la bêtise de demander ce qu'il fallait faire. "Téléphoner à Brest" voulait dire demander des consignes à l'Amirauté, c'est-à-dire aux bureaucrates terriens dont les fesses, à ce moment précis, étaient au sec et la connaissance du problème maritime, aussi.

(3) Référence explicite, mais les sources bibliographiques de la brochure montrent, de manière équilibrée, une importante documentation institutionnelle, de la presse mais aussi un corpus assez cossu en littérature et philosophie. C'est ce qui rend le texte aussi attrayant que percutant. Quant aux illustrations, outre le parti pris du noir et blanc, très esthétique en l'occurrence, elles font la part belle à la peinture, au dessin, à la gravure comme signalé plus haut, et à la photo d'art.

(4) Lecture faite, oui : radicalement différent. Et analyse impeccable.