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La scène se passe au bord de la rivière Yamuna, à New Delhi. Paysage bucolique, quatre personnes : trois hommes portant un pagne blanc avancent dans une eau calme, parmi ce qui pourrait être une débâcle printanière, de petits groupes de glaçons ou monticules de neige très blanche, très pure, flottant sur la surface de la rivière. Une femme en sari à dominante rouge s'aventure également dans la rivière.

A y mieux regarder, les berges n'ont pas l'air si propres que ça, la rivière est couleur de plomb fondu et personne n'a l'air heureux sur cette photo. Les hommes affichent des mines circonspectes, la femme carrément dégoûtée.

Comme il neige rarement à New Delhi (il semble qu'il y ait eu un petit épisode en 2012, mais dans le forum qui l'évoque, il est question finalement du Cachemire), force est de constater qu'il s'agit d'une pollution gigantesque qui vient d'achever les jours déjà comptés de Yamuna, une des sept rivières sacrées de l'Inde. En tapant "Yamuna" dans Google, on peut voir d'autres clichés de cette monstruosité, une rivière sans poissons ni aucune forme de vie, mais où les humains continuent de nager, de s'asperger, de jouer au milieu de cette neige parfois étincelante de blancheur, parfois couleur de suie... Bref, des images aberrantes d'inconscience ou de fatalisme.

L'image en question illustre un article de "20 minutes" en ligne : « La destruction de l'environnement et la surpopulation représentent les deux plus grandes menaces, selon une enquête menée par le Times Higher Education auprès de 50 lauréats du prix Nobel (…) ». Ces scientifiques pointent aussi, à l'échelon planétaire, ce qui devient répétitif et presque lassant, plusieurs fléaux actuels parmi lesquels la "polarisation de la politique" (comprendre : la pensée unique ultralibérale dont tout le monde, apparemment, commence à se satisfaire mollement), le réchauffement climatique et bien d'autres maux de notre société appelés ailleurs nouvelles technologies, innovation, croissance, progrès, etc.

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Plus près de chez nous (enfin, de chez la Taulière) : une personne qui emménageait cette semaine dans un nouveau quartier, a transporté mardi son Choupi (pardon : son iguane avec son arbre) dans son nouveau logement où elle a laissé une fenêtre ouverte avant de repartir après avoir posé partiellement ses meubles. Vu chez France Bleu St-Etienne Loire.

Nous disons bien "ses meubles" parce qu'il est évident que : 1) se procurer un iguane dans une animalerie - c'est elle qui le dit - 2) l'appeler "Choupi" ; 3) l'abandonner dans un lieu inconnu sans son environnement nécessaire (mais non suffisant) ; en laissant la fenêtre ouverte, illustre les limites sans cesse repoussées de l'épaisse connerie ordinaire qui pousse certains humains à "s'acheter" des animaux, même les plus improbables. Et allez donc, on les déplace comme des meubles, autrement dit, on les considère comme une chose, le plus important aux yeux de l'acquéreur étant sûrement de publier sur Facebook des photos mettant en valeur son originalité et surtout son amour de la gloriole à deux balles, la vie, la santé et le bonheur de l'iguane n'étant, dans tous les cas, pas à considérer.

On s'étonne poliment qu'il soit encore possible de s'acheter les animaux les plus impropres à vivre sous nos latitudes, sans préjuger de ce qui a bien pu amener ceux-ci dans une animalerie - ni de ce qui autorise encore les animaleries à exister, et à vendre des bêtes "exotiques".

Entre les touristes qui cet été ont hâté la mort d'un bébé orque en se le repassant de main en main pour des photos de "famille" et ce fait divers navrant, on se dit que la cause animale n'en est même pas à sa proto-histoire.

La "propriétaire" de l'iguane avoue tranquillement qu'il était question de déménager le terrarium de l'animal seulement deux jours plus tard. Ben voyons. L'iguane s'est fait la malle (48 heures tout seul sur son arbre, dans un appart vide... Pas question Ninette, a-t-il dû se dire). Une photo de lui sur la route illustre l'article, aux dernières nouvelles on le cherche encore. « (...) on a reçu un appel d'une amie expliquant qu'un iguane se baladait à Côte chaude, » raconte l'imbécile heureuse, « je suis allée voir la photo et effectivement c'était lui ».

Effectivement !! Elle en a donc douté, jusqu'à ce qu'elle voie la photo de son animal ? Tant il est vrai que dans le quartier de Côte-Chaude, que la Taulière fréquente régulièrement (quoique, maintenant...) on croise à tout instant des iguanes un peu partout, surtout si l'on fait la fermeture du bar-pmu au coin de la place. Heureusement, donc qu'elle l'a reconnu sur la photo.

La dame sans cerveau précise que l'animal ne les a jamais mordus ni fouettés de sa queue. Malheureux Choupi ! Que d'occasions ratées, que de baffes qui se sont perdues ! Elle pense malgré tout que "là, dans la nature" (un quartier urbain tout de même) l'iguane pourrait se montrer violent, voire dangereux car "c'est assez hostile". Là, je vous le dis carrément, je pleure sur le vide neuronal de la proprio de Choupi.

Le malheureux bestiau se sera donc farci deux jours de canicule à 37 degrés sur le bitume et une chute du thermomètre de 20 degrés puisqu'il n'en fait plus que 16 ou 17 ce soir, et entre les deux, des pluies de plus en plus glacées. Assez hostiles en effet pour l'iguane moyen, si pour l'humain la descente du thermomètre a été appréciée. Heureusement, ça ne manque pas d'arbres à Côte-Chaude. Il y a même un parc magnifique (on espère que l'iguane en a trouvé le chemin) et beaucoup de jardins.

Dernière précision : à trois ans passés, Choupi est en pleine maturité sexuelle et, avec ses 2 mètres de long queue comprise, il représente ce qui est qualifié "de plus imposant des iguanes" selon Wikipédia. A bon entendeur, salut.

Iguana iguana, espèce de saurien, veux-tu bien rentrer à la maison et chanter "auprès de mon arbre, je vivais heureux..." !

Vous pouvez ranger vos affaires. Pour demain, vous me ferez dix lignes sur le lien entre ces deux informations. Bonne soirée.