Plus personne n'ignore que, a contrario de l'évanescente image du "virtuel" qui nous promène à longueur de pixels et d'octets comme quoi nous ne serions qu'efficacité optimale sur fond d'écran 16 pouces, chaque signe que la Taulière inscrit ici est à convertir en empreinte carbone, puisqu'aussitôt stocké dans un de ces "centres de données", bâtiments dévoreurs d'énergie, émetteurs infernaux d'une chaleur dont on n'a vraiment, mais vraiment pas besoin.

Voui voui, mais certains data centers reconvertissent cette chaleur en climatisation, la font partir dans "les réseaux chaleur" des villes, etc.

Ouais bon. On va pas s'infliger les coûts comparés de ces technologies qui commencent par nécessiter la construction d'autres bâtiments, la fabrication d'autres matériaux, donc : tunnels de plastoc et composites, engins de chantiers pour creuser, salles de contrôle et autres gadgets techniques chic avec une câblerie qui à elle seule déforesterait le département de la Marne, etc.

Y a pas d'issue, voilà tout, mémère, tu pourrais aussi bien fermer ta gueule plutôt qu'en rajouter dans l'éther.

Envoyer une photo par e-mail équivaut à laisser une ampoule allumée pendant une heure (mais de quelle puissance ?) Un message stocké en ligne représente 10 grammes de CO2 par an ==> supprimer 500 courriels inutiles c'est un arbre sauvé.

Sur ma propre boîte mail, 335 messages depuis le 22 octobre, et j'en ai supprimé 800 y a pas longtemps.

A ce propos : n'ayez donc pas peur de supprimer des mails. On croit toujours qu'on va avoir à rechercher des trucs et des machins, mais nan, enfin, vous ne voyez pas que le mail c'est le royaume de l'immédiateté, de la volatilité et de l'obsolescence effrénée ? Avez-vous déjà cherché un mail vieux d'un an pour y retrouver une info essentielle (périmée dès la semaine suivante) ?

A ce propos encore : ça vous ferait rien d'arrêter de "répondre à tous" quand votre réponse n'intéresse qu'un ou deux interlocuteurs, de cesser de traîner des "queues de mail" appelées pudiquement "conversations" quand le début du schmilblick n'intéresse plus du tout les autres, qui d'ailleurs ont déjà stocké 8 fois 30 messages pendant vos échanges ?

J'écris "mail" et pas "courriel" pour faire moins de signes, ha ha.

Les chiffres cités plus haut sur l'empreinte carbone des photos etc. figurent dans Télérama, presse vertueuse s'il en fut, du 7 novembre dernier, dans un articulet qui ressemble furieusement, maintenant que je le re-regarde, à un publi-reportage, mais où l'on nous vend la possibilité d'aller se renseigner sur le site d'une certaine Babette Porcelijn, lequel fournirait un questionnaire disponible pour, vous et moi, calculer "Notre empreinte cachée" (titre du bouquin de la dame, chez Seuil).

Las, sur le site en question, point de questionnaire disponible mais une avalanche, une farandole, une invasion tonitruante de louanges auto-distribuées par la dame à elle-même personnellement, assaisonnées d'un pacson de photos à sa gloire (et pof, pof, les ampoules partout !! C'est Versailles chez Babette Porcelijn), de panégyriques, tableau en temps réel de ses ventes, incitations à acheter, acheter encore... le tout dans un français assez maladroit genre traduction Google mais avec un luxe, une débauche d'illustrations colorées, de pavés énormes... Faites c'que j'dis...

Télérama : la bonne-conscience du bobo moyen, farci d'attrape-couillons ou d'interminables articles à la gloire d'Alain Cavalier par lui-même pour lui-même, de pubs pour des produits culinaires à l'empreinte carbone effrayante (mais peints en vert pour pouvoir figurer honoris causa dans ce canard, au fait, destiné aux nantis cultureux) et de bagnoles, bagnoles, bagnoles...

Mais alors, mémère Taulière, pourquoidon que tu le lis ?

- J'le lis pas, j'suis tombée dessus par hasard.
- Mais ouais. On te croit.
- Si, si, et je le prouve : j'utilise Télérama exclusivement en raison de la finesse de ses pages et des jolis photos ou dessins très colorés qu'on y trouve, lesquels sont ma source préférée pour les collages que je pratique en amatrice approximative.
- Enfin, tu l'achètes, quoi !
- Du tout. Une copine me les garde, c'est une troisième main et y a même un.e malhonnête dans la chaîne qui pique les mots croisés, alors voyez. Le bonheur n'est jamais complet.
- Voui mais enfin pour que tu découpes tes machins, faut bien que kékun l'ait acheté...
- Rooh bon, ça va.

Purée : encore deux pages de conneries. Des kilos de CO2.

A part ça j'ai encore cherché d'autres sites pouvant me permettre le calcul en question : je ne suis tombée que sur des sites commerciaux, ou sur un blog d'un sexisme crasse où le questionnaire à réponses multiples prévoit l'option "non mais les mecs ne restent jamais plus d'une nuit", "je suis une princesse et je ne vais jamais aux toilettes" ou "je préfère puer sous les bras" et autres "je suis blonde"...

Attendez-vous prochainement à un sabordage en direct de la Taulière, à une fermeture de l'Appentis en fanfare avec petits fours et coquetèles, un happening dont le vacarme médiatique renverra les sorties des derniers produits de la Pomme au rang de défilé des majorettes de Trifouillis-les-oies. Histoire de gagner en cohérence avec moi-même.