Face à la marée nauséabonde qui déferle pour clouer au pilori le "boxeur" gilet jaune, comme pour dénoncer, en des termes étonnants eux-mêmes de violence et de désinhibition, les "casseurs", quelques remarques et quelques faits :

- on pourrait être surpris par la couverture presse minimale - pour ne pas dire : l'absence de - concernant le commandant de gendarmerie qui a remonté une rue en cognant comme un malade sur plusieurs personnes, après avoir mis KO un jeune homme adossé à un mur, désarmé et qui ne l'avait en aucune manière agressé. Ah si, pardon : il est noir le jeune homme. Probable qu'Andrieux n'a pas supporté.

A mettre en perspective avec l'abondance de photos, vidéos retweetées et autres, montrant des gilets jaunes ou manifestants "déchaînés". On n'hésite même pas à faire des montages montrant deux fois le même geste comme s'il s'agissait une série, à mettre un gros plan sur un envol de chaussure, etc.

- une belle équipe de malhonnêtes, au sein du gouvernement (pardon pour le pléonasme), s'indignent de l'action du "boxeur" et inondent les médias de discours stigmatisants, voire médisants, à ce sujet.

- Christophe Dettinger est actuellement agent technique dans une mairie, mais c'est plus pratique et plus parlant de l'affubler de ce nom "le boxeur", que lui vaut la pratique de ce sport - champion de France senior en... mars 2003 ! - que de dire "Christophe Dettinger" ou "le manifestant", à la rigueur. Le boxeur, ça fait tout de suite plus cogneur, quoi.

- Est-ce que MM. Griveaux, Castaner et Philippe sont conscients que les gestes de Dettinger (coups de poing, coups de pieds au gendarme à terre) sont accomplis des centaines de fois par les "forces de l'ordre" et même pas dans le cadre des manifs de GJ mais sur de simples personnes contrôlées ou gardées à vue, que c'est maintenant documenté par vidéos et donc, incontestable ? M. Benalla a cru bon en son temps de s'y livrer lui aussi sans retenue, se croyant alors protégé par une impunité dont on verra si elle ne s'avèrerait pas, au final, toujours active.

Et donc, ces ministres sont-ils si malhonnêtes qu'ils ne peuvent pas convenir que, en la matière, la police donne le contre-exemple et ce, depuis de nombreuses années, soutenue par une litanie de non-lieux invraisemblable ?

- On ne mentionnera qu'en passant la flaque d'insanités produites par Luc Ferry, ancien ministre lui aussi totalement décomplexé au point de parler de "salopards d'extrême droite, d'extrême gauche et des quartiers" (et créant ainsi au passage un parti politique nouveau : "les quartiers") et de préconiser de tirer sur les manifestants. L'article consacré à Ferry donne la gerbe, n'allez pas le lire, le résumé ci-dessus suffit amplement. On est tout de même fondée à penser que si Ferry se lâche encore un peu plus il pourrait dire ce qu'il pense : "salopards d'extrême droite, d'extrême gauche, et noirs et arabes". A mon avis il est à deux poils d'y parvenir.

Et maintenant, faits et contexte locaux - relatés par une de mes proches qui est allée régulièrement aux "samedis des gilets jaunes" dans notre bonne ville, et par un hooligan de 86 ans de ma connaissance, ancien responsable CFDT du secteur banque (on voit là le monde de violence aveugle dans lequel cet agitateur a fondé sa volonté d'en découdre) :

- A Saint-Etienne il est de notoriété publique que les manifestations se sont toujours déroulées dans un calme relatif, avec des forces de police à peu près responsables (Castaner dirait aujourd'hui qu'elles s'étaient montrées laxistes), évitant en général de gazer ou de charger les foules. La topographie particulière de la ville a sans doute inspiré aux responsables locaux cette sagesse.

- Or, depuis le début du mouvement, les policiers se sont montrés de plus en plus agressifs, ce sont eux qui déclenchent les hostilités. Témoin mon octogénaire (non boxeur) qui se trouvait samedi après-midi place Jean Jaurès (celle maintes fois filmée par les télés locales) : « il ne se passait rien, on n'était pas très nombreux, y a des jeunes qui ont brûlé quelques cartons sur la voie du tram et là, "ils" (les flics ndlr) ont dégainé les lacrymogènes et ont commencé à les lancer en grand nombre, sans discernement… Alors tu penses bien, j'avais jamais vu ça ! On est partis... » - Ce vieillard virulent précise : « il n'y avait personne sur les voies, personne autour, les trams ne circulaient pas, ça ne risquait rien, c'était un tout petit feu »(photos à l'appui dans la presse locale).

Aperçus par l'autre témoin : « j'étais à l'arrière de la foule, c'était plutôt bon enfant, et tout à coup on a entendu "pop pop pop", les flashball qui mitraillaient, ils arrosaient même pas à la distance réglementaire. On courait, y avait un gars qui avait l'arcade sourcilière ouverte (tir de flashball), un autre qui avait la main ouverte de haut en bas et le doigt qui pendait. Heureusement, les médic les ont pris en charge. »

« Ils ont pris deux de nos potes, un s'est fait tabasser dans le camion. - Il a porté plainte ? - j'en sais rien, mais les flics eux ont porté plainte… »

« Y avait une mémé toute courbée, à l'avant de la manif, avec sa fille, qui lui arrangeait son bonnet, ses lunettes de ski et son masque. Elle a dit "à mon âge je peux pas courir, alors y faut que je m'équipe". »

« Maintenant les flics avancent en position de tir, bras tendus. »

« L'autre samedi (période de Noël, ndlr) ils ont gazé des gamins (photos à l'appui et confirmation par le journal local Le Progrès), y avait des gens qui étaient sur l'animation de Noël, les gosses dans le circuit de luge géant, les gosses ils glissaient sur la piste et y avait des palets de lacrymo qui descendaient en même temps qu'eux ! Ils ont bien vu que c'était plein de gens qui n'avaient rien à voir ni avec les gilets jaunes ni rien, ils étaient venus avec leurs gosses pour la patinoire ou la luge mais ils n'ont pas hésité à gazer quand même. »

« Quand on court pour échapper aux keufs, y a des gens, on sonne aux portes en bas des immeubles, eh ben ils nous ouvrent. »

« Ils ont gazé aux Ursules, y avait les bagnoles qui descendaient le cours Victor Hugo, qui n'avaient rien à voir avec le truc - en fait on s'était dispersés dans les rues perpendiculaires en bas, et ils nous ont poursuivi par là-bas et ils sont revenus vers le cours et ils ont mis des lacrymo, les gens dans les bagnoles étaient bloqués sur place, ne pouvaient pas se tirer de là, la fumée des lacrymo tout autour, qui devait rentrer dans les bagnoles... »

« A Saint-Etienne depuis que les GJ se donnent rendez-vous dans l'hypercentre où ils ont descendu quelques vitrines ("Orange, le "commerce local", ha ha), dès qu'ils arrivent place Jean Jaurès ils sont chargés direct. »

Au mépris même des animations pour enfants occupant la place. Et du "plus petit commerce" local, un pizzaïolo qui se prend de la lacrymo plein pot depuis plus d'un mois dans son petit kiosque dont il ne peut pas sortir. Et des brasseries riveraines, idem. Mais : il s'agit de protéger la préfecture, qui est en fond de place. Ce déploiement de robocops surarmés et vindicatifs n'a d'autre objectif en effet que d'empêcher la populace d'atteindre, éventuellement, l'entrée de la Préf.

Dire que Griveaux, dans la capitale de la France, n'a même pas été protégé efficacement et qu'on a démoli sa porte de son beau ministère !!! Il devrait faire muter les contingents stéphanois là-haut, tu verrais comme ils te garderaient la porte, tiens !. Evacué, le Griveaux.. Hé mec, va te faire évacuer en Syrie, tu comprendras le sens de "évacuation".

Et les autres, là-haut, qui n'ont toujours rien compris... Même pas surpris qu'un mouvement social s'éternise en plein hiver, contre toutes les habitudes de "la rue" qui se mobilise, on le sait, davantage au printemps. Ca ne leur donne aucune indication sur la colère qui monte ? Sur la durée probable du mouvement ?

On avait tout de même le débat public à 14 000 boules par mois de la présidente de la commission :

« La Commission nationale du débat public est définie ainsi : "Elle veille au respect de la participation du public au processus d’élaboration des projets d’aménagement ou d’équipement dès lors qu’ils présentent de forts enjeux socio-économiques ou ont des impacts significatifs sur l’environnement ou l’aménagement du territoire" ».. (source l’Alsace.fr via une blog-pote)

Mais voilà que Jouanno a renoncé ! Elle causait pourtant bien la langue de bois.