Certain.e.s se demandent pourquoi la Taulière, dont vous sentez bien que les salades vont s'épicer, au fil de la dégustation, de la question fondamentale de notre rapport au vivant-qui-n'est-pas-humain, pourquoi elle commence avec des âneries à propos de goûts alimentaires et de cuisines du monde.

Eh bien, la Taulière voue aux gémonies les annonceurs de catastrophes inéluctables, les collapsiologues aussi bien que les brandisseurs de croissance-sans-laquelle etc. Plutôt que de frayer avec l'angoisse (ce matin sur France Culture, un philosophe se demandait à voix haute "après l'angoisse, pourquoi ne pas essayer l'effroi ?"), avec la déprime-du-monde-qui-finit, elle ambitionne, avec ses petits bras et son mètre cinquante neuf, de ramer dans le sens de l'espoir, de l'agir.

Et puis elle en a marre de "qui c'est qui commence ?"

On sait maintenant que 1) les politiques ne feront rien sans une contrainte majeure sur leur trombine, voire sans une kalash pointée sur leur breuchigne. Et 2) que pour faire bouger ces politiques de bien mauvaise volonté, faut qu'on s'y mettre tou.te.s. Gilets jaunes, gilets verts, gilets rouges, etc.

Et donc, elle commence léger, pour ne pas rebuter son innombrable lectorat.

Mais c'est pour mieux en arriver plus ou moins à ce qu'on a mis cinquante ans à énoncer. Même si là, quand je l'écris, tout le monde hausse les épaules devant cette porte enfoncée en se disant pauvre Taulière, elle découvre l'évidence... et en faisant semblant de savoir tout ça de longue date quand vous l'avez appris comme moi dans le poste ces deux dernières années : le fait que l'avenir du climat - donc de la Terre - est intimement lié à la question du partage des richesses, que cette planète est archi suffisante pour celleux qui l'habitent à condition qu'il n'y ait pas 20 000 salopards qui se goinfrent au détriment de milliards d'autres, que la température, la sécheresse, la faim, sont dues essentiellement au pillage des ressources par les gavés et non à une espèce de famine universelle qui nécessiterait une agriculture criminelle aussi bien en termes de cultures vivrières que d'élevage, etc.

A propos de con, je voulais vous dire depuis assez longtemps que la raison pour laquelle j'ai personnellement une dent assez aiguë contre Macron, c'est pas tant ce qu'il fait ou dit - qui est conforme à ce qu'est le bonhomme, une fois pour toutes fossilisé dans sa culture de bourgeois aisé qui n'a jamais peiné à rien, qui aime d'amour le monde du grand capital et n'est pas capable de regarder son pays en face, parce qu'il n'a pas les outils intellectuels pour le décrypter.

Non, la raison, c'est qu'il a voulu nous faire croire qu'il était intelligent. Avec sa campagne électorale pensée comme le lancement d'un produit marketing (déjà dénoncée ici en son temps), il nous a balancé du Ricoeur, de l'herméneutique sur France Culture, des images d'archives de ses "performances" théâtrales adolescentes, bref : il nous l'a faite à l'intellectuel.

Or, je me considère comme gravement trompée, parce que Macron est un con. Un con grave, de la pire espèce : de ceux qui n'aperçoivent pas le bout de leur connerie parce qu'en plus ils sont myopes. Ceci explique peut-être les propos aberrants qu'il tient depuis son élection et même avant, lesquels propos sont intelligemment mis en scène sur tous les articles vendus à l'Enlysée Boutique, (que je vous ré-engage vivement à visiter, en plus ils font des soldes et leur dernier gilet jaune est craquant). Des phrases qu'aucune personne intelligente ne pourrait prononcer sans honte.

Lui, si. On dirait que la célèbre phrase d'Audiard "c'est même à ça qu'on les reconnaît" a été écrite pour lui.

Ce billet est dédié à Monique, poule à bord du voilier Yvinec.