... Et un été comme la Taulière les aime : 15 degrés le matin, 25 l'après-midi. Voualla.

1 La Taulière a des dons de voyance. Elle le sait depuis longtemps, mais la preuve

Jean-Pierre Farandou, nouveau patron de la SNCF, livrait à ses troupes, le 2 juillet, son programme "ambitieux et touffu", dixit Le Monde, dans une téléconférence adressée à 3000 cadres, « un exercice de cohésion au moment où la loi a transformé (depuis le 1er janvier) l’établissement public historique en une société anonyme dotée de six filiales (Réseau, Gares, Voyageurs, Fret, Keolis, Geodis). » (c'est moi qui mets en évidence les mots importants).

En juillet 2019, la Taulière rédigeait un billet énorme et chiant (dixit son titre), consacré à KEOLIS, à la SNCF et aux "opérateurs de la mobilité" comme on dit en woody-wood language. Ce billet faisait suite à un tour de passe-passe constaté sur place dans les transports en commun de Lille en cours de privatisation, encore une preuve que la maire Aubry est une vraie socialiste du coeur, un peu comme Collomb à Lyon.

J'y annonçais tout bonnement que les "EPIC" (établissements publics à caractère industriel et commercial) n'étaient que des structures temporaires inventées par la droite libéro-libérale pour servir de cheval de Troie et entrer bien à fond dans les services publics afin de, à terme... Ben, les privatiser, quoi.

« C’est par ce biais, au fond assez grossier et qui appelle la métaphore du magicien, que l’économie de marché est en train de faire main basse sur le service public.

En « épicisant » les entreprises nationales puis en les filialisant, on y introduit progressivement du capital privé. A petites cuillerées. En somme, on mithridatise le service public pour qu’il ne soit pas empoisonné par les capitaux privés à haute dose qu'on ne va pas tarder à lui embocquer.

La mémoire collective étant ce qu’elle est (c’est-à-dire bien inférieure à celle d’un nouveau-né de deux jours), vous et moi finirons par oublier qu’il y avait eu, autrefois, un service public : on ne voit plus qu’une nébuleuse de sociétés emboîtées à la manière des poupées russes, dans lesquelles bien malin qui pourrait y retrouver ses petits (mais les gros actionnaires, eux, s’y retrouvent). »

Voilà qui est fait, six mois plus tard. En janvier 2020, les anciens "EPIC" de la SNCF sont avalés et transformés purement et simplement en filiales de société anonyme.

Mon exercice de voyance (billet 560 - "Devoir de vacances chiant au possible" du 28 juillet 2019) ne péchait que par un oubli : la date de réalisation.

2 Du coup, besoin de légèreté

La semaine passée, la Taulière se rend dans une pâtisserie où elle veut acheter, pour les glisser dans un colis d'anniv' destiné à ses petites-filles, des "serpents" de guimauve. Ces deux nénettes sont dingues de la guimauve et semble-t-il, à Paname elles n'en trouvent pas. Mais si, en fait. C'est juste qu'elles aiment les découvrir dans les colis de mamie et que mes guimauves à moi sont particulièrement bonnes, je les achète au "Nelson", le salon de thé pâtisserie nec plus ultra de la haute bourgeoisie stéphanoise.

Merdum, pas de guimauves au Nelson !!! Je me rabats sur une boulangerie-pâtisserie d'en face, où les gâteaux sont généralement pas mal non plus. Mais bon, c'est pas le même standing.

Le vendeur, un jeune mec très souriant de 18-20 ans, est en short assez court et débardeur. Effet garanti côté face, où l'on voit dépasser du chic tablier noir, brodé au nom du commerce : en haut deux bras costauds et tatoués, en bas deux guibolles très poilues, assez dodues, plantées sans chaussettes dans des baskets taille 48. Le haut n'est pas mal non plus : jolis yeux clairs, chevelure brune abondante et barbe de hipster, le tout enfourné sous une "visière" anti-COVID.

J'étouffe de justesse un rire incongru en détaillant le côté pile : débardeur, short court, très court même, fesses rebondies ; les bretelles du tablier croisent dans le dos, comme il sied aux jeunes vendeuses élégantes, et la ceinture nouée fait un joli flot de ruban au niveau du short. C'est d'un érotique !

Ma charmante vendeur s'évertue à pêcher, à l'aide d'une pince métallique, les rubans de guimauve au fond de gros bocaux de verre. L'entreprise est ardue : il fait chaud, la guimauve est plus que demi-molle, si vous me passez l'expression, et glisse sans arrêt. Voilà que les étiquettes carton, qu'il tient de l'autre main, "guimauve, 2 €" et "parfum verveine - fraise" dégringolent au fond du bocal.

Là, sans se démonter, le voilà qui plonge dans le bigntz pour récupérer ses étiquettes. Opération farfouillage à la pince, puis avé les doigts, COVID-vivra verra... A ce stade, la pince métallique n'est plus obligatoire, n'y aurait plus qu'à tirer sur les serpents manu militari. M'enfin, il y parvient tout de même. Ah, j'en veux deux autres ? D'un autre bocal ? Parfum : "barbe à papa". Tiens, se dit in petto le jeune vendeur, ça je connais pas. Le voilà qui maintenant relève sa visière, plonge le nez dans le bocal et respire longuement (tant qu'il aspire ça va, pourvu qu'il souffle en dehors du récipient). Il a l'air un peu dubitatif après son enquête olfactive, du coup moi aussi, bien que sa barbe n'ait pas "trempé" dans le bocal.

Je rentre chez moi avec des serpents de guimauve abîmés par cet accouchement aux forceps, collés-serrés dans deux méchants sachets de papier. Avec la chaleur elles achèvent de s'emmêler, et quand j'arrive à la maison c'est du gloubi-boulga fraise barbe-à-papa papier kraft. Je ne peux pas mettre ça dans un colis... Il faut ressortir, courir chez Weiss acheter l'autre friandise particulièrement appréciée de mes parigotes : la pâte à tartiner, parfums : caramel et "croustillante", qui a l'avantage d'être en bocal.

Et les guimauves ? Eh bien, elles sont étaient dans mon frigo. Dans un premier temps j'espérais qu'elles retrouveraient une certaine rigidité, et puis non. Ca fait une semaine que je mange mon dessert coupé au ciseau, je les ai finies aujourd'hui. Le parfum "barbe à papa" c'est bidon, c'est juste rose et sucré.